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CO-ECRITURE AVEC PIERRE DURIN

Pierre Durin : ses influences littéraires

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A la fin des années soixante et au début des années soixante-dix, nos professeurs de français, croyant bien faire, nous donnaient à lire Thérèse Raquin, Thérèse Desqueyroux et probablement d’autres Thérèse que j’ai dû oublier.Je n’ai rien contre les Thérèse, j’ai même été un peu amoureux d’une jeune Thérèse quand j’avais quinze ans, mais ces livres me tombaient des mains, aussi me suis-je cru longtemps trop bête pour apprécier la « vraie » littérature. Je ne l’abordais que sous la contrainte et je vivais cela comme une punition. Et je crois pouvoir parler au nom de tous mes camarades de l’époque. Quel garçon (c’était un collège de garçons), quel garçon de treize ou quatorze ans peut savourer la lecture de Thérèse Raquin ? S’il s’en est trouvé un, il n’a pas cherché à me faire partager son enthousiasme.

Jusqu’à un âge que je n’ose avouer ici, je n’ai pu lire (avec plaisir) que les aventures de Bob Morane, écrites par Henri Vernes (Charles-Henri Dewisme) et publiées aux éditions Marabout. De bons petits bouquins de cent-cinquante pages que je dévorais comme des plaques de chocolat aux noisettes.

Un jour, fasciné par le dessin sur la couverture, j’ai acheté L’Autre Côté, d’Alfred Kubin. Je ne me suis pas méfié : c’était aussi un livre édité par Marabout, donc, pensais-je, un livre pour moi, un livre pas difficile. Par habitude, comme pour les Bob Morane, je l’ai lu en cachette, vous pensez : un Marabout ! Mais j’ai senti que ce livre, c’était autre chose qu’un Bob Morane ! (Henri Vernes, qui a droit à toute ma tendresse et à toute ma reconnaissance, comprendrait ce que je veux dire).

Grâce à cette précieuse collection (Marabout Fantastique), j’ai découvert Edgar Allan Poe, Jean Ray et son onirique Malpertuis, Alexandre Dumas et son Meneur de Loups, les contes fantastiques de Maupassant et de Théophile Gautier et encore Gustav Meyrink avec son inquiétant Golem.
Sur la quatrième page de couverture du Golem, on pouvait lire : A la suite d’Achim von Arnim et d’E.T.A. Hoffmann, Gustav Meyrink (1868-1932), l’un des maîtres de Kafka, etc…
J’ai voulu savoir qui étaient Von Arnim et Hoffmann et surtout ce Kafka qui avait eu pour maître l’auteur du Golem et ainsi, de proche en proche, avec le sentiment de faire l’école buissonnière, j’ai lu Le Procès et Le Château, bien avant qu’on ne m’en parle en classe. Les auteurs dits classiques m’étaient devenus accessibles et familiers, j’étais sauvé !

Dans Une Bibliothèque de Littérature Universelle, un texte écrit dans l’été 1927, Hermann Hesse conseillait :
…il ne faut pas trop inciter les enfants et les adolescents à lire certains ouvrages, car on risque de les dégoûter à vie de la fréquentation des plus beaux textes, voire de la lecture en général. (A bon entendeur…)

Dieu merci, ça ne m’est pas arrivé : ma rencontre précoce avec le sombre Zola ne m’a pas empêché de devenir un lecteur passionné. Bien des années après le collège, alors que personne ne m’y obligeait, j’ai même tenté de lire enfin Thérèse Raquin « pour mon propre plaisir ». Après quelques pages, je me suis précipité sur un volume des Mille et Une Nuits.

Que je lise ou que je me hasarde à écrire, mon penchant naturel me fait éviter les routes du réalisme pour suivre les sentiers tracés par les conteurs fantastiques, les poètes de l’imaginaire.

 

Au sujet de notre co-écriture

Peu avant de fêter le premier anniversaire de notre rencontre, le 5 septembre 2014, Pierre et moi nous sommes décidés à faire se rapprocher nos univers respectifs, par la création de nouvelles.
Nous avons choisi une méthode de travail qui ressemble à un jeu : l’un de nous « distribue les cartes », propose un contexte, introduit un ou plusieurs personnages selon la forme qu’il souhaite, et prend une direction que le second auteur va découvrir une fois cette distribution terminée. Celui-ci « abat son jeu » après avoir pris connaissance des cartes de son partenaire, en proposant une fin, une chute, suivant la direction envisagée par le premier ou décidant de faire bifurquer l’ensemble, avec l’apparition, s’il le souhaite, de nouveaux personnages. Mais il peut arriver que celui dont le rôle est de terminer la nouvelle ne désire pas le faire immédiatement. Il peut alors sortir son « joker » et « relancer le jeu », en continuant l’histoire sans l’achever…

Nous avons sur ce site 7 nouvelles à vous proposer. Bonne lecture !